Verdissement des voitures de société : position de la FPB

La Fédération Pétrolière Belge a pris connaissance des propositions législatives sur le verdissement des voitures de société en Belgique et d'accorder un régime fiscal favorable exclusif pour les "voitures 100 % zéro émission". La décarbonisation des transports jouera un rôle important pour contribuer à la réalisation des objectifs climatiques. Ceci est aussi illustré dans le Plan National Energie et Climat. Le secteur pétrolier souscrit à une politique de verdissement du parc automobile et y contribuera, mais fait les commentaires et recommandations suivants par rapport à  l’initiative parlementaire :

Etre clair sur ce qu’est un véhicule zéro émission.

  • Il faut définir clairement ce qu’on comprend par des voitures « 100 % zéro émission ».
  • Si le critère est uniquement les émissions d’échappement du véhicule alors oui le véhicule électrique correspond à ce cela. Mais il est clair que le critère local n’est pas nécessairement le bon critère pour le devenir de la planète. 
  • La performance des véhicules et de leur énergie spécifique (thermique, électrique/hydrogène, hybride, etc.) doit être objectivée,  sur une base scientifique. Pour le calcul des émissions de CO2, cette évaluation doit se baser sur une analyse complète du cycle de vie, afin de garantir des conditions de concurrence équitable entre les différents véhicules et énergies.  Ainsi les voitures électriques ne sont exemptes d'émissions qu’au niveau de l'électricité produite et utilisée pour le chargement de la batterie ou pour la production de l’hydrogène …que si cette électricité provient de sources renouvelables. En 2018, seul 23%  de l’électricité produite en Belgique venait d’énergies renouvelables[1]. Un véhicule consommant un carburant bas carbone pourrait à ce stade même émettre moins de CO2 non circulaire qu’une voiture électrique.  

Respecter de la neutralité technologique pour que toutes les solutions puissent se développer 
La Commission européenne a souligné à plusieurs reprises l'importance de la neutralité technologique dans sa politique et à travers ses mesures. Ainsi la directive européenne sur les carburants alternatifs indique que la législation doit être élaborée sans favoriser un type de technologie particulier, afin de ne pas entraver le développement des carburants et des vecteurs énergétiques renouvelables alternatifs.

Les carburants se développeront comme une des solutions 
Dans sa stratégie à long terme, l'Europe intègre également les carburants liquides à faible teneur en carbone ou neutres pour le climat. Ces carburants innovants existent déjà ou sont en cours de développement : biocarburants durables de nouvelle générations et carburants de synthèse,  basés sur les technologies « Power-to-Liquid » dont les e-fuels[2]

  • Ces carburants innovants peuvent déjà être utilisés dans les moteurs des voitures actuels et donc pour le consommateur sans investir dans une nouvelle voiture ou avoir besoin d’une nouvelle infrastructure de distribution. La contribution au verdissement du parc automobile se fera à travers l’évolution vers un carburant bas carbone. Ceci leur justifie une place dans le mix énergétique de demain.
  • A côté de l'électrification des voitures particulières et l'amélioration de l'efficacité énergétique des moteurs, tous les types de véhicules, neufs ou anciens, avec un moteur hybrides/à combustion utilisant des carburants liquides à faible teneur en carbone peuvent contribuer progressivement à la neutralité climatique en 2050. En outre, ceci n’engendre aucun coût supplémentaire pour l'utilisateur, ni aucun investissement des autorités dans les réseaux de distribution.
  • Les voitures électriques prendront une place importante, mais il reste à établir dans quelle mesure ils pourront répondre à tous les besoins de mobilité des citoyens et du secteur économique et dans quelle mesure la Belgique réussira à convertir l’entièreté de sa capacité électrique en source renouvelable et à l’étendre pour satisfaire les besoins supplémentaires en électricité renouvelable tels que pour les véhicules électriques. Face à ces défis  il convient d’assurer pour les véhicules un mix énergétique diversifié où les véhicules à moteur thermique avec des carburants durables et les voitures hybrides ont une place .
  • Afin d'atteindre l'objectif de zéro émission, il sera nécessaire, dans le cadre de la transposition de la directive européenne sur les énergies renouvelables (RED II) dans le Plan national énergie et climat, de donner en plus des biocarburants aussi une place aux carburants liquides circulaires de synthèse.

Faire évoluer la fiscalité mais avec pertinence et avec une neutralité budgétaire

  • Un régime fiscal d’encouragement , ou de découragement, doit  viser le résultat et par exemple porter sur toutes les technologies qui permettent un transport à faible émission ou à émission zéro sans favoriser une technologie particulière, respectant ainsi le principe de neutralité technologique.
  • La fiscalité est un mécanisme qui permet d'orienter les changements de comportement et d'encourager les consommateurs à opter pour des moyens de transport durables. La FPB demande que l'introduction éventuelle de taxes supplémentaires (taxe kilométrique, taxe carbone, taxe LEZ, etc.) soit intégrée dans un ensemble cohérent, tenant compte des taxes (accises sur l'essence et le diesel) et autres impôts liés. Sans cette cohérence on se retrouvera très vite avec des niches fiscales supplémentaires, qu’ il faudra contrôler et faire respecter, et dont il faudra assurer la pertinence et l’équité par rapport aux autres mesures.   Aujourd'hui, seuls les carburants diesel et essence sont assujettis aux accises, y compris les biocarburants qui y sont mélangés. Les accises sur les carburants de transport se sont élevées à 5,6 milliards d'euros en 2019 (hors TVA). À l'avenir, l'utilisation de la route devra être taxée différemment et tous les usagers de la route (y compris ceux qui utilisent des carburants alternatifs) devront contribuer. Le remplacement des voitures thermiques dans la rue de la Loi ou sur le ring de Charleroi par des voitures électriques ou utilisant d’autres énergies alternatives (comme l’hydrogène, le LPG ou le CNG) ne résoudra pas les problèmes d’embouteillage. Les solutions doivent découler d'un changement de comportement et de proposition d’alternatives. Un système fiscal adapté peut y contribuer. Un système intégré devrait être budgétairement neutre, sans charge fiscale supplémentaire pour les citoyens et les entreprises.

Les citoyens et consommateurs veulent participer à l’évolution, mais avec la possibilité de choisir comment. 
Une enquête[3] récente  montre que les Belges demandent davantage d’options dans le cadre de la transition vers une mobilité bas carbone et ils estiment qu'un mix diversifié de technologies vertes sera nécessaire. Seuls 22 % des Belges estiment que les voitures électriques représentent la seule solution pour réduire les émissions de CO2, tandis que 60 % estiment que les carburants alternatifs (comme les biocarburants durables, l'hydrogène ou les carburants liquides synthétiques) peuvent également y contribuer. En Belgique, 70 % des personnes interrogées estiment que les automobilistes doivent toujours avoir la liberté de pouvoir choisir le type de voiture (essence, diesel, hybride, électrique…) qu’ils souhaitent. Ils soulignent ainsi qu’il n’appartient pas aux pouvoirs publics de déterminer quelle technologie doit être privilégiée ou interdite.

Les autorités doivent créer les conditions de réussite d’une évolution en ouvrant les possibilités plutôt que de restreindre le développement de certaines technologies.  Les autorités ont un rôle crucial à jouer dans la mise en place de conditions équitables pour toute technologie (électricité, gaz, carburants synthétiques, biocarburants de nouvelle génération, ...) qui peut contribuer de manière significative au verdissement des voitures.

Avec le développement de carburants liquides à faible teneur en carbone ou neutres pour le climat, notre secteur veut être un partenaire durable des décideurs politiques pour aider à atteindre les objectifs climatiques.

 

[1] SPF Economie, PME, Classes moyennes et Energie - ‘ENERGY Key data Édition mars 2020’ 
[2] Les E-fuels sont des carburants synthétiques produits à partir d'hydrogène vert (produit avec de l'électricité renouvelable, par exemple, solaire et éolienne) et de CO2 (provenant du captage du carbone). Ils peuvent être produits partout où il y a effectivement des conditions favorables (soleil , vent) et transportés ensuite.  Ils sont neutres sur le plan climatique car la même quantité de CO2 libérée lors de la combustion (p.e. moteur de voiture) est captée (CCS) pour être utilisée dans le processus de production. Il s'agit donc de carburants circulaires qui n'augmentent pas le CO2 dans l'atmosphère. 
[3] Enquête européenne réalisée en septembre 2019  par Fuels Europe (www.fuelseurope.eu) auprès de 10.000 personnes en Europe, dont 1.005 en Belgique